Article du site www.usinenouvelle.com (7/2/14) :
Pionnier de la promotion du travail à distance, Philippe Planterose,
sociologue du travail, est aussi président de l’association française du
télétravail et des téléactivités (AFTT). Il publie aux éditions
Eyrolles Télétravail, "Travailler en vivant mieux". Dans l’interview
qu’il nous accorde, il revient sur les atouts de cette organisation du
travail et sur les moyens pour en faire un levier de performances.
L’Usine Nouvelle - Où en est-on aujourd’hui en matière de
télétravail en France ? Qu’en est-il du retard souvent évoqué en la
matière ?
Phillipe Planterose - Longtemps, le télétravail,
défini comme la possibilité de travailler à distance, en se connectant
au serveur de l’entreprise, a été peu développé en France. Beaucoup de
gens télétravaillaient au noir, c’est-à-dire en dehors d’un cadre légal.
Toutefois, la situation a évolué. Aujourd’hui, les derniers sondages
indiquent que 17 à 20 % des salariés travaillent à distance. C’est un
bon résultat.
Quelles modifications managériales implique le télétravail ?
Pour qu’il soit vraiment opérant, mieux vaut travailler par objectif et
par processus, plutôt qu’avoir un management au fil de l’eau, où les
tâches sont traitées à mesures qu’elles arrivent. Beaucoup d’entreprises
de travail intellectuel fonctionnent de cette façon, sans aucun
processus pré-établi. On y traite la charge de travail à la journée,
réagissant immédiatement. Dans ce type d’organisations, le télétravail
est plus complexe à faire fonctionner.
Le management par processus n’est pas encore généralisé en France.
Certains cadres, dont la formation initiale remonte à avant les années
2000, ne s’y sont pas encore mis. Cela peut être compliqué pour eux.
Mettre en place le télétravail exige des salariés autonomes et des
managers qui reconnaissent l’autonomie. Car le rôle du N+1 doit
changer : il doit considérer le collaborateur comme son premier client,
auquel il apporte des ressources pour être autonome. Le N+1 n’est plus
un censeur en chef, un commandant qui donne des ordres mais un
entraîneur d’équipe.
Les salariés sont-ils toujours demandeurs de télétravail ? Quels avantages y trouvent-ils ?
Le télétravail réduit le temps de transport. En conséquence, le salarié
est en meilleure forme pour travailler, car il subit moins de fatigue
et moins de stress. Les études montrent qu’à l’inverse un indépendant
qui travaille depuis son domicile a intérêt à passer du temps à
travailler en dehors de son domicile pour être plus efficace. C’est
l’alternance qui est bénéfique.
Y’a-t-il une durée optimale pour le télétravail ?
Le télétravail déploie tous ces effets positifs quand le salarié passe
la moitié du temps dans son entreprise et l’autre moitié à distance. Aux
Etats-Unis,
où de nombreuses études ont été réalisées sur le sujet, il a été établi
que cette forme d’organisation du travail a des effets inattendus. Elle
réduit le nombre de divorces et l’absentéisme, améliore la santé au
travail des salariés, favorise la réussite scolaire de leurs enfants.
N’y a-t-il aucun risque ?
Tout dépend de la manière dont il est mis en place. Tous ces effets
bénéfiques pour le salarié, et, j’insiste, pour l’entreprise qui profite
de salariés qui vivent mieux, sont réduits si on met en place une
surveillance idiote des faits et gestes, si on installe des mouchards
qui observent le salarié. Le télétravail demande qu’on vérifie les
résultats pas qu’on contrôle la personne. Pour dire les choses
autrement, oui, le télétravail peut-être l’instrument de l’imbécilité.
N’est-ce pas fondamentalement une préoccupation de bobos qui travaillent dans les agglomérations ?
Vous plaisantez ? Les problèmes de transport ne sont pas limités à
l’Ile-de-France et à quelques grandes métropoles régionales. Selon
l’Insee, le trajet moyen de travail est de 25,9 kilomètres. Et en milieu
rural, le temps de transport moyen pour aller travailler est de 40
minutes. Je vais régulièrement dans la Drôme et je peux vous assurer que
le matin les routes pour rejoindre Valence ne sont pas vides. La
question du temps de transport est généralisée et concerne un grand
nombre de personnes. Le télétravail est une question qui renvoie aux
paradigmes de l’organisation du travail. Travailler autrement,
travailler mieux en étant mieux, ce n’est pas un problème de bobos.
Dans l’industrie, certaines personnes sont postées. Comment
faire pour que certains acceptent le télétravail des autres sachant
qu’ils n’en bénéficieront pas ?
Généralement, les personnes qui sont obligées de venir sont conscients
des contraintes. Ils savent bien qu’on ne le fait pas pour les embêter,
pour les punir. Ils ne sont donc pas opposés à ceux qui télétravaillent.
D’ailleurs, dans n’importe quelle entreprise, les salariés savent que
les commerciaux sont nomades. Ça n’a jamais posé de problèmes.
Ensuite, le télétravail ce n’est pas l’auto-organisation. Si on a
besoin de voir quelqu’un on doit savoir que c’est son jour de
télétravail. De même, il faut prévoir les horaires auxquels la personne
est joignable. Réciproquement, le manager et les autres salairés doivent
s’interdire d’appeler le salarié en dehors de ces heures. Le
télétravail doit être organisé. Dans les entreprises de plus de 50
salariés, un accord collectif doit être signé. Idem pour l’avenant au
contrat de travail qui précise les conditions du télétravail.
De plus en plus de travail se fait en groupe, dans des
réunions. Ce qui est gagné en efficacité individuelle n’est-il pas perdu
dans le travail collectif ?
En étant présent deux ou trois jours sur le lieu de travail, on peut
toujours faire des réunions. En outre, il existe de nombreux outils pour
se réunir à distance, notamment la téléconférence. Aujourd’hui, il est
même possible de travailler simultanément sur le même document sans
jamais se voir. C’est le quotidien des salariés travaillant dans les
entreprises qui ont plusieurs sites, en France ou dans le monde.
Aujourd’hui, tous les outils sont disponibles pour que le télétravail
se développe dans de bonnes conditions. Je ne vois qu’un seul bémol :
pour les petites entreprises qui n’ont pas l’informatique en interne,
mais les nouvelles solutions qui se développent leur offrent des
perspectives intéressantes.
Christophe Bys
Dans la mise en place du télétravail, Nileo, cabinet de conseil et de formation en sécurité et environnement, basé au Mans vous accompagne pour identifier des actions à mettre en œuvre, suivant les aspects managériaux, techniques et juridiques.
De plus, nous proposons au cours de l'année différentes formations dont : Une sensibilisation à la mobilité durable.
Contactez-nous pour toutes informations en écrivant à contact@nileo.fr ou directement au 09.82.43.72.85
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